
Introduction
Les conventions de management fees constituent un levier stratégique fréquemment utilisé dans les groupes de sociétés pour externaliser certaines fonctions de direction ou de gestion. Cependant, leur traitement fiscal a longtemps été source d’incertitude, en raison des remises en cause fréquentes par l’administration fiscale sous le prisme de l’acte anormal de gestion.
Les décisions récentes du Conseil d’État et des Cours administratives d’appel (CAA) ont clarifié certains aspects, tout en maintenant un niveau d’exigence élevé quant à la justification de ces conventions. Cet article fait le point sur les évolutions les plus récentes en la matière, notamment au regard des arrêts de novembre 2024.
Le Conseil d’État, dans un arrêt du 4 octobre 2023 (Société Collectivision), a assoupli la position sur la rémunération indirecte des dirigeants via des structures interposées. Il a jugé que ces conventions ne constituaient pas, en soi, un acte anormal de gestion, dès lors que :
Cette décision a eu un impact immédiat sur les contentieux de 2024, où plusieurs Cours Administratives d'Appel ont statué dans des directions parfois opposées.
✅ Arrêt favorable : CAA Paris, 22 novembre 2024 (Société Kerac)
Dans cette affaire, la société requérante avait cessé de rémunérer directement ses dirigeants et avait confié ses fonctions de direction à des sociétés tierces nouvellement créées. L’administration avait tenté de requalifier ces opérations en acte anormal de gestion au motif que les prestations faisaient « double emploi » avec celles des anciens dirigeants.
Cependant, la Cour a rejeté le redressement en considérant que :
🔎 Enseignement : Un choix de gestion est opposable à l’administration si la preuve d’une rémunération indirecte est rapportée.
❌ Arrêt défavorable : CAA Nancy, 15 novembre 2024 (Société Technic Industries)
À l’inverse, la CAA de Nancy a annulé la déduction des management fees versés par une filiale à sa société mère au motif que :
🔎 Enseignement : L’absence d’un formalisme strict (vote explicite des organes sociaux) peut entraîner la qualification d’acte anormal de gestion et une remise en cause de la déduction des charges.
L’un des enseignements majeurs des décisions récentes est l’importance du formalisme dans l’adoption des conventions de management fees. En effet, plusieurs arrêts ont démontré qu’en l’absence d’une validation explicite par les organes sociaux compétents, la convention pouvait être requalifiée en acte anormal de gestion.
💡 Trois formes de validation sont admises par la jurisprudence :
💡 Enseignement clé :Une validation explicite via un procès-verbal clair est la meilleure protection. Une validation implicite via les statuts peut être admise, mais elle doit être accompagnée de preuves démontrant une intention claire des organes sociaux.
Les décisions récentes mettent en lumière les éléments cruciaux pour éviter une requalification fiscale. Voici les meilleures pratiques à suivre :
1️⃣ S’assurer que la convention ne couvre pas des prestations redondantes avec les missions légales du dirigeant.
2️⃣ Veiller à une rémunération enligne avec les standards du marché et proportionnée aux services réellement fournis.
3️⃣ Formaliser la validation par une résolution spécifique des organes sociaux et éviter la seule approbation des comptes.
4️⃣ Fournir des justificatifs concrets des prestations réalisées (rapports, factures détaillées, e-mails,réunions).
5️⃣ Anticiper les contrôles fiscaux en documentant dès le départ toutes les décisions et les justifications.
Conclusion
Les décisions de 2024 confirment que la preuve est l’élément clé pour sécuriser la déductibilité des management fees. En l’absence d’une validation formelle et d’une justification précise des prestations, le risque de redressement fiscal reste élevé.
📌 Recommandation finale : Pour toute structuration de rémunération via des management fees, il est impératif d’anticiper les exigences fiscales et d’adopter une approche rigoureuse en matière de preuve et de documentation.